Texte pour la toile rose

«Quand on a la varicelle, il ne faut pas se gratter, sinon les boutons laisseront des cicatrices.»  Et puis ce rose aussi cache des cicatrices.  En dessous, j'avais peint le virus de cette maladie contagieuse.  Elle ne le fut pas assez, contagieuse j'entends, alors, je l'ai effacée par ce rose, qui suggère tant de choses.  Pour moi, c'est une couleur, que je me suis approprié, d'un restaurant pas tout à fait propre que j'aie gardé dans ma mémoire parce que, plutôt que de le nettoyer, on y faisait brûler de l'encens, à l'approche de clients.  Ce mur de resto, un peu graisseux, même très, enduit par la graisse de cheveux, de dos exsudant la sueur, de mouches déféquant à longueur de journée, d'araignées somnolentes tout près de leurs toiles, le tout baignant dans une odeur de friture, laissa une image indélébile dans mon esprit.  J'ai dû partir, sans manger; même pas une tasse de thé.

Une jeune et jolie femme, vêtue d'un négligé noir, à la poitrine ample et généreuse, cogne sur le chambranle de ma porte d'hôtel entre-ouverte.  Elle entre et me demande qui je suis.  Nous échangeons de tout et de rien, les pieds nus, toute la nuit.  Au petit matin, elle est partie en claquant la porte derrière elle.

Par ailleurs, c'est aussi un petit rose cochon, qui sent la chair, les petites culottes couleur «chose», et le vieux soutien-gorge de la semaine dernière.

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Rose, 2007, huile sur tableau / oil on painting, 7’ X 5’ 6’’, 2,14 X 1,68 m.